LE DEBUT DU XXIème SIECLE OU LA MISE EN PLACE D’UN SIECLE ASIATIQUE

L’actualité internationale montre que Vladimir Poutine connaît de nombreux revers militaires. Cependant économiquement il réussit à maintenir la Russie à flot. Cela se fait à quel prix ? Au prix d’une vassalisation vis-à-vis de la Chine, dont la prééminence économique est de plus en plus marquée. Cette vassalisation sourde et progressive est le signe d’un changement d’ère implicite et qui aura sans doute des conséquences majeures à long terme. Le XXIème siècle s’annonce en effet être un siècle asiatique. Cela avait commencé avec le 11 septembre dont les événements avaient été commandités depuis l’Afghanistan. Mais le développement économique fulgurant de la Chine, celui de l’Inde dont nous parlons moins mais qui est également significatif, montre que l’Asie est le nouveau grand gagnant de ce siècle. L’Occident, comme le dit Hubert Védrine, n’a plus le monopole de la puissance. Il est également voué à peser de moins en moins.

Nous vivons de manière sourde à une phase historique extrêmement classique. Celle tout d’abord d’une relative décadence, celle de l’Occident. Cette phase se retrouve dans les nombreuses crises économiques subies (celle de 2008, celle des dettes souveraines), la montée des populismes, la baisse dramatique du nombre de professeurs qui risque à terme de conduire au déclassement de bien des pays occidentaux… Parallèlement la Chine a sorti 800 millions de personnes de la pauvreté en investissant massivement dans l’éducation. Elle a appliqué à merveille la dialectique du maître et de l’esclave de Hegel : en se faisant l’usine du monde, elle a acquis par la ruse un grand nombre de savoirs faire technologiques. Contrairement à l’URSS et la Russie d’aujourd’hui, elle a d’abord misé sur le développement économique avant d’acquérir une armée de qualité. Aujourd’hui sa capacité à déployer des missiles hypersoniques, sa capacité à aller sur la face cachée de la lune, le lancement d’un yuan digital… sont autant de guerres larvées mais extrêmement dangereuses pour la suprématie américaine et plus largement occidentale. La Chine a au fond la même idée que Kant qui soutenait que le premier facteur de la puissance est celui de l’argent. Ce qui a créé la primauté de l’Angleterre sur la France par exemple dans l’histoire était la concentration de ses forces sur le progrès économique, plus que les français : la révolution industrielle a eu lieu dès le milieu du XVIIIème siècle et les premiers marchés financiers anglais sont apparus bien avant les français. C’est la raison pour laquelle les Anglais, pendant la guerre de sept ans, avaient réussi à générer autant de ressources militaires que les Français alors qu’ils étaient trois fois moins peuplés. Au XXème siècle les Etats Unis l’ont emporté sur l’Union Soviétique grâce à son poids économique. Les Russes, en se concentrant d’abord sur le politique et le militaire, n’ont à terme pas fait le poids face à la puissance économique américaine. Cependant la Chine s’attaque aujourd’hui à ce qui faisait la prééminence des Etats Unis : la supériorité technologique, la prééminence de la monnaie (en créant un système capable de ringardiser SWIFT, qui est un garant de la primauté du dollar)… En bref une guerre économique, qui en fait un adversaire bien plus dangereux que ne l’avaient été les Soviétiques.

Aujourd’hui, on en parle peu, l’Asie est le premier moteur économique du monde. Ce changement est considérable. Souvent, on l’a constaté dans l’histoire, la prééminence économique précède le pouvoir politique et militaire. Nous assistons donc à des changements sourds et majeurs. Cette tectonique des plaques semble donc très importante, et redistribue profondément les cartes des forces en présence. L’Asie retrouve donc un rôle qu’elle avait perdu mais qu’elle a eu pendant extrêmement longtemps, sans doute sa place normale finalement.

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